dimanche 13 décembre 2009

"Fenêtre d'en face", de Blandine

Blandine est une adepte de l'atelier. Cela fait plus de 2 ans qu'elle y participe. Ecriture fine, avec le souci du détail, Blandine s'attache à écrire des faits et gestes au plus près de la réalité quotidienne. Ce jour-là, le thème de Joëlle Guillais traitait de "la personne habitant l'immeuble d'en face"...

Ça y est. Ils sont partis. Ils sont vraiment sympas, Martine et Jean, d'être venus m'aider. Sans eux, je n'y serai jamais arrivée. Ouh la la, ces cartons partout ! Je rangerai demain, plus tard, j'ai toute la vie. Ce soir, je suis naze, tout ce que je veux, c'est me poser. Une petite bière et rêver. Me voici chez moi ! Il est super, ce fauteuil, j'ai eu de la chance de pouvoir le récupérer. Il faudra que je trouve une jolie lampe à mettre à côté. Pour l'instant, il fait encore jour ; vive le mois de mai, les jours rallongent, je peux laisser la fenêtre ouverte, il fait doux. C'est drôle, ces bruits de repas, de vaisselle, ces cris dans la cour ; ça change de la montagne, tout ce boucan. Tiens, il y a un type, en face, à sa fenêtre. On dirait qu'il regarde par ici. Bon, je m'en fous. Allez, ce serait bien que je range un peu, pour pouvoir me coucher. Le matelas est inaccessible, il faut au moins que je fasse mon lit. Dans quel carton sont les draps ? Merde, je ne vais jamais les trouver. Pfiou, j'ai chaud ! Tiens, mes affaires de toilette, ça, je sais où les ranger. Vivement la douche ! Allez, je dégage le lit, j'empile tout ça, je prends un yaourt et je me couche. Mais il est encore là, lui ? Il n'est pas trop occupé, au moins. C'est vrai qu'on est dimanche soir. C'est pas l'heure du film ? Il n'a peut-être pas la télé. Il préfère mater à la fenêtre. Ah, mais les voilà, mes draps ! je ne me souvenais pas de les avoir mis là. Hmmm, même roulés en boule, ils sentent bon la lessive. Voilà, mon duvet par dessus et hop, c'est prêt. Une serviette, un T-shirt, je file me doucher. Il a intérêt à disparaître pendant ce temps-là, le gars d'en face.

Jean-Paul n'a pas bougé. Il est accoudé à sa fenêtre, le nez posé sur ses trois géraniums qu'il entretient avec soin depuis des années. Hypnotisé par la fenêtre d'en face. Il en oublie les autres étages, qu'il surveille, d'habitude. La revoilà. A peine vêtue, juste un T-shirt au ras des fesses. Dommage qu'il commence à faire un peu sombre. Pendant qu'elle était sous la douche, il a défroissé le drap du dessus, tapoté l'oreiller pour qu'il soit bien moelleux, allumé la lampe de chevet. Il a trouvé le réveil, qu'il a posé à côté en mettant la sonnerie à 7 heures. C'est son heure. Quand elle sera sur le point de s'endormir, il se glissera discrètement entre ses draps.

Blandine, mai 2009

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